Immobilier
15 min reading • Feb 15, 2024

Des Origines de la Propriété Privée à la Tokénisation : Une Petite Histoire de la propriété immobilière.

L’histoire de l’immobilier est intimement liée à celle de la propriété privée. Depuis l’Antiquité, chaque époque – de Rome au Moyen Âge, de la révolution industrielle à nos jours – a redéfini notre rapport à la terre, aux biens, et aux modes de transmission. Urbanisation, industrialisation, spéculation : autant de bouleversements qui ont façonné le marché immobilier moderne.

Aujourd’hui, à l’ère numérique, la tokénisation immobilière ouvre un nouveau chapitre. En réinventant les règles du jeu, elle promet un accès élargi à l’investissement et une transformation en profondeur du secteur.

Mais pour mieux comprendre là où nous en sommes, on vous propose dans cet article de prendre du recul pour mieux comprendre les racines du marché immobilier actuel en Europe et plus particulièrement en France.

L'histoire De l'Immobilier: Des Origines à l'Époque Moderne

Cette grande histoire remonte à l'ère préhistorique, où les premières formes d'habitat étaient souvent temporaires et liées au mode de vie nomade. Dans ces sociétés primitives, où l'activité "proto-industrielle" se limitait à la cueillette, à la chasse et à la pêche, la propriété du sol était généralement collective, avec des droits d'usage partagés parmi les membres d'une tribu ou d'un clan.

Révolution Néolithique et émergence de la propriété privée

L'histoire de l'immobilier trouve ses racines dans la Révolution Néolithique, période clé marquée par l'apparition et la généralisation de l'agriculture entre 10 000 et 2500 av. J.-C. Cette révolution agricole, qui débute principalement dans les régions du Croissant fertile, de l'Afrique subsaharienne et de la Mélanésie, va profondément modifier les structures sociales et économiques des groupes humains :

  • Transformation progressive des communautés nomades en sociétés sédentaires.
  • Augmentation significative du taux de natalité grâce à la stabilité offerte par la sédentarisation.
  • Spécialisation et division sociale du travail.

La domestication agricole nécessite en effet l'exploitation de terres dédiées, attribuées spécifiquement à certains groupes spécialisés dans la production et la gestion alimentaire. Les autres membres de la communauté, libérés des tâches strictement agricoles, peuvent ainsi se spécialiser dans divers métiers (artisans, bâtisseurs, éleveurs, guérisseurs, etc.), ou adopter des rôles non directement productifs, tels que guerriers, administrateurs ou prêtres chargés de la gestion, de la protection et de la taxation des ressources agricoles.

Mais quel lien avec l'histoire de l'immobilier ?

La réponse réside dans l'apparition même du concept de propriété privée, directement lié à ces terres agricoles. Cette évolution conduit à la reconnaissance des droits individuels sur les biens fonciers, influençant profondément la structuration foncière et juridique ultérieure. Par exemple, en Mésopotamie vers 3000 av. J.-C., l'histoire de l'immobilier voit apparaître les premières traces concrètes de propriété privée dans le célèbre Code d'Hammurabi. Ce code comprend explicitement des règles concernant la division des terres agricoles, les transactions immobilières et la résolution des litiges fonciers, protégeant ainsi les droits des propriétaires sur leurs biens meubles (esclaves, outils) et immeubles (terres, maisons, jardins).

Ces évolutions sont essentielles pour comprendre l'origine de notre concept moderne de propriété immobilière.

L'influence de l'Antiquité et du droit romain sur les notions de propriété immobilière

Dans l'histoire de l'immobilier, l'Antiquité romaine représente une étape essentielle, particulièrement sophistiquée et influente pour les systèmes juridiques modernes. Les Romains ont élaboré un cadre juridique avancé autour du droit de propriété, influençant durablement le droit civil occidental.

Une scène de vie dans une cité Romaine
Le droit Romain, les débuts de la propriété individuelle

Cependant, comme l'indique Jean-Pierre Coriat dans son ouvrage:

"Les Romains n’ont pas élaboré une analyse dogmatique du droit de propriété. Ce sont les juristes du Moyen Âge et de l’époque moderne qui, à partir des textes épars du droit romain, ont formulé une conception absolutiste de la propriété"

Le droit romain pose néanmoins les fondations essentielles de la propriété individuelle et développe un ensemble complexe de règles juridiques sur la propriété immobilière, incluant des procédures de transfert, des limitations et différentes formes de propriété adaptées aux contextes sociaux et économiques de l'époque.

Parmi ces formes, la notion de propriété quiritaire (dominium ex iure Quiritium) émerge vers la fin de la République romaine. Cette forme pleine et exclusive de propriété était réservée aux citoyens romains (Quirites) et concernait spécifiquement les biens considérés comme romains.

Le droit romain introduit également des concepts avancés tels que le démembrement de propriété, incluant l'usage, l'usufruit, les servitudes personnelles, ainsi que des contrats de location longue durée comme l'emphytéose et la superficie. Ces mécanismes juridiques permettaient un usage temporaire ou partagé du bien immobilier tout en protégeant les intérêts du propriétaire.

Enfin, le droit romain distingue clairement possession et propriété véritable, contribuant à définir légalement les notions fondamentales de biens meubles et immeubles, établissant ainsi les bases juridiques toujours pertinentes aujourd'hui.

L’Europe et le système féodal : la terre comme principale richesse

Au Moyen Âge, la propriété immobilière dans le système féodal était caractérisée par une structure fragmentée et hiérarchisée, très différente de la notion moderne de propriété absolue. La terre représentait alors la principale source de richesse, et sa possession impliquait souvent des obligations de service et de loyauté envers un seigneur.

La tenure constituait le fondement de ce système : un tenancier (ou vassal) détenait un bien immobilier d'un seigneur en échange de redevances, de services ou de corvées. Cette tenure pouvait concerner une exploitation paysanne (maison, pré, terre) ou un fief noble. Les occupants réels de la terre tenaient leurs parcelles de supérieurs hiérarchiques conservant des droits distincts sur les biens concédés.

La propriété était divisée en deux droits distincts : le domaine éminent et le domaine utile. Le domaine éminent, détenu par le suzerain, impliquait des droits souverains sur la terre. Le domaine utile appartenait au tenancier, lui conférant le droit d'exploiter la terre et d'en percevoir les fruits moyennant le paiement d'un cens. Progressivement, ce domaine utile s'est renforcé, devenant souvent héréditaire voire perpétuel (censive perpétuelle).

Ce régime ne s'appliquait pas uniquement aux zones rurales mais aussi aux biens immobiliers urbains. Dans les villes, le principal concédant n'était souvent pas la noblesse mais le clergé, propriétaire de la plupart des terrains et bâtiments.

C'est aussi à cette époque qu'on voit apparaître le concept de Propriété viagère en France, et donc non le Viager n'est pas du tout une invention moderne : Déjà au Moyen-âge le droit coutumier permettait une propriété temporaire qui s'éteint au décès de son titulaire (bien sûr le contexte n'est pas le même qu'aujourd'hui, mais tout de même !)

En résumé, la propriété immobilière au Moyen Âge était complexe, caractérisée par une répartition des droits entre seigneurs et tenanciers, des obligations mutuelles et une hiérarchie structurée, profondément différente du concept moderne de propriété individuelle absolue.

La transformation de la propriété sous l'Ancien Régime.

Sous l'Ancien Régime, la propriété foncière a subi d'importantes transformations. La féodalité, bien que toujours présente, a évolué vers une forme plus centralisée de pouvoir foncier. Au début de cette période la terre et les immeubles sont soumis à une superposition de droits, héritée du système féodal (On retrouve les concepts de Domaine Éminent et Domaine Utile).

Dès le XIIIe siècle, le marché des rentes, également appelées « croîts de cens », s'est développé en raison de l'essor des valeurs immobilières . Les propriétaires pouvaient vendre des rentes sur leurs maisons, ce qui était considéré comme la vente d'une partie de leurs droits réels sur l'immeuble et nécessitait l'ensaisinement par le seigneur et le paiement de redevances. Le nombre de rentes pouvant être assises sur un immeuble n'était pas limité et elles étaient perpétuelles, ce qui pouvait entraîner une accumulation de charges. Des ordonnances royales ont ensuite ôté leur caractère perpétuel aux rentes, les détachant de l'immobilier et permettant leur rachat.

De fil en aiguille, surtout au XVIIIe siècle, la propriété utile des tenanciers s’est renforcée de fait : les paysans et bourgeois deviennent, dans la pratique, les véritables propriétaires de leurs terres ou immeubles, bien que le droit féodal subsiste officiellement. Cette évolution s’explique par la liberté croissante de vendre, d’acheter et de transmettre les biens, ainsi que par la reconnaissance fiscale de la propriété utile par la monarchie. Les défis juridiques liés à la féodalité ont conduit à des débats sur la nature de la propriété privée, en particulier sur l'importance de consolider les droits individuels face à un système féodal fragmenté.

Renaissance, Révolution et l'Émergence du Droit Moderne de Propriété Immobilière

Le système féodal, fondé sur la hiérarchie des droits entre seigneurs et tenanciers, commence à s’effriter sous la pression de l’économie monétaire et du développement des échanges marchands. La terre et les immeubles deviennent progressivement des objets de contrat : ils peuvent être achetés, vendus, hypothéqués ou loués plus librement, notamment dans les villes et les régions commerçantes.

Et les Anglais “inventèrent” la propriété privée

À la Renaissance (XVe-XVIe siècles), l’Europe connaît une évolution majeure de la notion de propriété immobilière. Les juristes de l’époque, influencés par la redécouverte du droit romain, commencent à remettre en question la superposition féodale des droits sur la terre. Ils élaborent une conception nouvelle de la propriété, inspirée du dominium romain, qui valorise le droit exclusif et absolu d’user, de jouir et de disposer d’un bien (usus, fructus, abusus)

Cette valorisation de la propriété individuelle, inspirées par les juristes et philosophes qui associent propriété et liberté individuelle (Kant, Hegel), se matérialise finalement par le vote de l’Inclosure Act par le Parlement Anglais en 1773.

Cette année-là, le Parlement prend acte d'une révolution légale. En autorisant les propriétaires à clore leurs champs, la Chambre des communes inaugurait la possibilité d'utiliser, d'user et de disposer d'un bien. La propriété exclusive était née.

La consécration de la propriété individuelle et absolue.

La Révolution française abolit les droits féodaux (cens, champart, etc.) et consacre la propriété comme droit individuel, inviolable et sacré, ne faisant ainsi que légaliser une évolution déjà largement amorcée dans les faits à la fin de l’Ancien Régime.

Les réformes révolutionnaires ont introduit des lois permettant à tout citoyen de posséder des biens, affranchissant ainsi la propriété des entraves féodales. Cette période a vu la redistribution des terres confisquées à l'Église et à la noblesse, renforçant l'accès à la propriété privée.

Les biens confisqués, notamment ceux du clergé, de la Couronne et des condamnés de la Révolution, furent vendus comme biens nationaux. Cette vente des biens nationaux, qui a eu lieu pour l’essentiel entre 1791 et 1796, a entraîné une vaste redistribution de la propriété immobilière et foncière.

L'influence du Code Civil (1804) et sa définition du droit de propriété.

En France, Le Code civil de 1804, souvent appelé Code Napoléon, a été crucial dans la formalisation du droit de propriété. Il a établi des règles claires et précises pour la possession et le transfert de biens immobiliers.

Le Code civil a défini la propriété comme un droit absolu, permettant aux propriétaires de jouir et de disposer de leurs biens de manière presque illimitée, sous réserve de la loi. Cette codification a permis de standardiser les pratiques immobilières et de créer un cadre juridique solide.

Il faut mentionner que le Code de commerce de 1804 a également donné une existence légale aux agents d'affaires (ancêtres des agents immobiliers) dans son ancien article 632, qui réputait acte de commerce toute entreprise d'agence ou de bureau d'affaires. Cette reconnaissance légale, bien que ne portant pas directement sur la définition de la propriété, a contribué à structurer les activités liées au marché immobilier naissant. Une existence légale de la profession d'agent immobilier fut ensuite intégrée par le Code du commerce en 1807.

L’immobilier au XIXe Siècle : Industrialisation, Urbanisation et les Prémices du Marché Immobilier Moderne.

Le XIXe siècle a été une période de changements rapides, marquée par l'industrialisation et l'urbanisation. Ces phénomènes ont profondément influencé la demande immobilière, conduisant à la formation des premiers marchés modernes de l'immobilier.

Industrialisation, Urbanisation et impact sur la demande immobilière.

La révolution industrielle des XVIIIe et XIXe siècles a entraîné une urbanisation massive (structures, emplois, commerces, industries…), avec une migration des populations rurales vers les villes, augmentant considérablement la demande en logements et en infrastructures urbaines pour les classes ouvrières qui viennent peupler désormais ces villes dynamiques.

On assistera également à un nouvel essor du commerce et à l’émergence d’une classe bourgeoise qui entrainera également une demande accrue pour des propriétés privées en milieu urbain. Les villes, autrefois dominées par de grands propriétaires aristocratiques, passent progressivement sous le contrôle d’une bourgeoisie propriétaire qui considère le logement comme une marchandise et une source de revenus. Les titres de propriétés sont devenus des documents officiels qui facilitent les transactions.

Les usines et les infrastructures ont transformé le paysage, créant de nouvelles opportunités pour le développement immobilier. D’un point de vue de la technique, cette période a également vu l'introduction de nouveaux matériaux comme l'acier et le béton, permettant la construction de bâtiments plus grands et plus résistants, tels que les immeubles de plusieurs étages et donc d’un tout nouveau type de foncier. On remarque à cette époque une plus grande diversité dans les types de propriétés disponibles, des immeubles d'habitation aux complexes industriels.

Ces changements ont posé les bases de l'immobilier moderne, où la localisation et l'accessibilité sont devenues des facteurs clés.

L'apparition des premières agences immobilières.

Avec l'augmentation de la demande, les premières agences immobilières ont vu le jour pour faciliter les transactions et gérer les propriétés. Bien que le Code de commerce de 1804 ait donné une existence légale aux agents d'affaires, la structuration de la profession s'est poursuivie au cours du XIXe siècle. John Arthur et William Tiffen sont considérés comme les pionniers de ce concept d’agence immobilière (des Britanniques installés à Paris). Ces agences ont joué un rôle crucial dans la professionnalisation du secteur immobilier et donneront naissance à des réseaux, des syndicats professionnels et tout un pan de l’activité autour de l’immobilier, qui bien qu'encore timide à cette époque, explosera au siècle suivant.

Ces agences ont introduit des pratiques standardisées pour l'évaluation, la vente et la location de biens immobiliers, créant un marché plus transparent et accessible. Les agents immobiliers ont ainsi permis aux acheteurs et aux vendeurs de naviguer plus facilement dans un marché en expansion.

Cette professionnalisation contribue à l'essor du marché immobilier moderne, en établissant des normes et des réglementations encore en vigueur aujourd'hui.

Le rôle de la finance et de la Bourse dans le développement immobilier

Au XIXe siècle, la finance et la Bourse ont aussi commencé à jouer un rôle croissant dans l'immobilier, en fournissant le capital nécessaire pour soutenir le développement et l'expansion urbaine. Les investissements boursiers ont permis de financer de grands projets immobiliers, comme la construction de quartiers résidentiels et d'infrastructures publiques.

D’un autre côté on assiste alors à un début de concentration des capitaux de la propriété immobilière, avec une pénétration massive des associations de capitaux (compagnies d'assurances et sociétés immobilières liées aux banques) sur le marché.

  • En Allemagne, à Berlin, la spéculation s'organise autour de puissantes sociétés foncières (Terraingesellschaften), qui, soutenues par les banques, contrôlent le capital foncier et une part significative du crédit immobilier. Le prix du sol représente alors jusqu’à 40 % du coût total de la construction de logements.
  • À la fin du XIXe siècle, on observe une concentration accrue du financement immobilier autour du groupe du Crédit Foncier de France . Son portefeuille de prêts a plus que doublé entre la fin du Second Empire et les années 1880.

Cette montée en puissance de sociétés immobilières et d’assureurs qui investissent massivement dans la pierre,  joue un rôle central dans le financement de l’immobilier, facilitant l’accès au crédit hypothécaire et la réalisation de grandes opérations immobilières.

Les institutions financières posent ainsi des bases solides pour le marché immobilier moderne, en introduisant des instruments financiers qui ont permis un développement plus rapide et plus efficace du secteur.  La fin du XIXe siècle a cependant été marquée par la grande dépression immobilière, principalement visible à Paris. Elle a conduit à un changement de régulation sur le marché immobilier parisien, avec un rôle décisif joué par le secteur financier.

Réglementations et Préoccupations concernant l'Habitat Insalubre

L'industrialisation rapide du XIXe siècle entraîne une urbanisation massive, soulevant de nouvelles préoccupations concernant les conditions de vie dans des quartiers souvent surpeuplés et insalubres. L'habitat insalubre devient alors un enjeu central nécessitant une réponse réglementaire.

En France, les premières interventions réglementaires apparaissent, comme la loi du 13 avril 1850 sur le logement insalubre, visant à assainir les villes en démolissant les quartiers en péril. Plus tard, la loi Siegfried de 1894 marque une étape décisive dans l'histoire de l'immobilier français en initiant la politique du logement social, avec la création des premières "habitations à bon marché" (HBM), accessibles aux travailleurs pour la location ou l'achat.

Ces premières réglementations établissent des normes essentielles concernant la ventilation, l'assainissement et l'espace vital. Leur objectif principal est d'améliorer les conditions de logement pour protéger la santé publique et le bien-être des habitants. Elles posent ainsi les fondements des politiques modernes de logement, toujours adaptées aujourd'hui aux défis urbains contemporains.

Le développement de la propriété dissociée du sol et des immeubles

Vers la fin du XIXe siècle en France, le concept de dissociation de la propriété du sol et des immeubles émerge à nouveau (le concept de démembrement que l'on a vu dans les époques précédentes), permettant des transactions immobilières plus flexibles. Cela ouvre la voie à des formes de propriété plus diversifiées. Cette dissociation a permis de séparer la possession du terrain de celle des constructions, facilitant le développement d'espaces urbains complexes comme les copropriétés. Cette mutation entraine de nouvelles opportunités d'investissement et de gestion immobilière.

Les terrains étaient loués avec une liberté pour le locataire de construire des usines ou des logements. Ce système était avantageux pour le locataire, qui n'avait pas à immobiliser des fonds dans l'achat du terrain et se voyait reconnaître la propriété des constructions, et pour l'investisseur en terrains, qui pouvait attendre la hausse des valeurs foncières tout en percevant un revenu régulier. Ce type de placement pouvait paraître d’autant plus rentable pour l’investisseur que les droits du locataire étaient mieux garantis : un arrêt de la Cour de cassation de 1873 assimile en effet le droit de superficie à un droit de propriété.

L’immobilier au XXème Siècle : Démocratisation, Réglementation et Professionnalisation du Secteur Immobilier.

L'évolution de l'immobilier en Europe au XXème siècle a été marquée par des périodes de fortes mutations, influencées par les guerres, la croissance économique, les politiques gouvernementales et les changements sociaux.

La démocratisation progressive de la propriété immobilière et l'accès au crédit immobilier.

Au début de ce siècle, les taux de crédit immobilier étaient souvent élevés en Europe, parfois supérieurs à 10%, limitant ainsi l’accès à la propriété à une certaine minorité. C’est le modèle de location qui dominait les villes et la figure du “propriétaire” était donc souvent associée à une forme de pouvoir social (ou tout du moins d’une figure importante) dans les grandes agglomérations.

Un essor des sociétés de crédit à terme différé a lieu en France entre 1936 et 1938, période de mise en sommeil des sociétés de crédit immobilier faute de fonds publics . Ces nouvelles caisses, également appelées caisses d'épargne collective immobilières, s'adressaient principalement aux petits fonctionnaires et employés des chemins de fer.

Il faudra attendre la période des Trentes Glorieuses pour que la propriété immobilière devienne plus accessible grâce à l'expansion du crédit immobilier. Les banques ont commencé à offrir des prêts hypothécaires, permettant à un plus grand nombre de personnes d'accéder à la propriété.

De 1945 à 1975, la croissance économique et l’urbanisation rapide entraînent une forte demande de logements. Les taux de crédit immobilier baissent progressivement (environ 6 % dans les années 1950-1960), rendant l’accession à la propriété plus accessible à la classe moyenne.

Le développement du crédit à taux fixe a permis aux ménages de financer l'achat de leur logement, rendant la propriété accessible à des classes sociales plus larges. Cette démocratisation a transformé le marché immobilier, le rendant plus dynamique et inclusif.

Le XXème siècle sera au final le siècle de l’essor de la copropriété, de la diversification des modes d’accession, et de l’intervention de nouveaux acteurs qui transforment la propriété en un produit financier et patrimonial.

L'intervention de l'État dans le logement au milieu du XXème

Les périodes de guerres, et la crise de 1929 provoquent bien évidemment des périodes d’instabilité et d’incertitudes économiques (sans parler de la destruction de bon nombre de logements suite aux différents bombardements). À la suite de la Première Guerre mondiale, la plupart des pays belligérants ont maintenu le contrôle des loyers, une mesure initialement destinée à soutenir les familles dont un membre était mobilisé, on note ces pratiques en France, au Royaume-Uni, Italie, Espagne, Roumanie …

En France, L’entre-deux guerre se caractérise principalement par un relatif attentisme en matière de construction immobilière et de politique du logement. Alors qu’ailleurs en Europe le renouvellement du parc immobilier est en marche (notamment aux Pays-Bas, en Angleterre et en Allemagne).

Après la seconde guerre mondiale, l’heure est à la reconstruction dans toutes les régions d’Europe. Les grandes agglomérations ayant été des cibles stratégiques (production industrielle, bâtiments militaires, etc.). Les États ont renforcé leur méthodes d’intervention pour pallier ce problème : bloquages de prix, initiatives de construction bon marché, allocation-logements, etc.

Le blocage des loyers par exemple a été introduit pour stabiliser les prix et éviter la spéculation excessive. Ces mesures ont permis de maintenir l'accessibilité au logement, bien qu'elles aient également créé des défis pour les propriétaires. Les réglementations sur les loyers ont évolué au fil des décennies, cherchant à équilibrer les droits des propriétaires et des locataires, tout en répondant aux réalités économiques changeantes.

Pendant les Trente Glorieuses, les programmes gouvernementaux ont inclus la construction de logements sociaux le renouvellement du parc immobilier, la régulation des loyers et le soutien à l'accession à la propriété. Ces interventions visaient à garantir un logement décent et abordable pour tous. Pour autant l’urbanisation massive (et notamment la construction des grands ensembles) soulève dans de nombreux pays d’Europe des problématiques de qualité de vie et d’isolement urbain.

Essor et professionnalisation du marché immobilier

Le XXe siècle a également vu l'émergence d'un marché de l'immobilier de bureau en plein essor, en réponse à la croissance économique et à l'urbanisation. Au début du 20ème siècle, l'immobilier de bureau était rare en Europe. Cependant, les grandes multinationales américaines ont commencé à exporter leur conception de l'immobilier de bureau, qui avait déjà atteint une certaine maturité dans les métropoles tertiaires d'Amérique du Nord comme New York et Chicago. Le Washington Plazza, construit en 1929 pour abriter le siège de Shell, préfigurait clairement l'avènement d'une nouvelle ère architecturale.

L'intérêt  pour l'immobilier d'entreprise s'est manifesté à partir de la fin des années 1960 . Ils ont commencé par développer une offre de bureaux lancés "en blanc", c'est-à-dire sans locataire identifié au début des travaux . Cette contrainte, ainsi que la recherche de gains de productivité, les a conduits à produire des immeubles de bureaux standardisés, marquant la naissance d'un véritable marché de l'utilisation.

Les immeubles de bureaux deviennent alors des éléments clés des centres-villes, facilitant la concentration des activités commerciales et pour stimuler l'innovation. Cette évolution a transformé le paysage urbain, intégrant des centres d'affaires modernes et dynamiques. On peut noter en France la création du quartier d’affaires de la Défense en 1958. Ce secteur continue d'évoluer, s'adaptant aux nouvelles normes de travail et aux besoins des entreprises dans l’ère qui mènera à la mondialisation.

Après la Seconde Guerre mondiale, la profession d'agent immobilier s'est structurée, avec la création d'associations professionnelles et l'introduction de normes éthiques et pratiques. Les agents immobiliers sont devenus des acteurs clés du marché, facilitant l'achat, la vente et la location de propriétés. Cette professionnalisation a renforcé la confiance et la transparence dans les transactions immobilières. Les agents immobiliers jouent aujourd'hui un rôle essentiel dans le fonctionnement du marché, aidant les clients à naviguer dans un environnement complexe et réglementé.

La financiarisation et l'internationalisation croissantes du secteur immobilier vers la fin du siècle

Vers la fin du XXe siècle, le secteur immobilier a connu une financiarisation et une internationalisation croissantes. Les investisseurs institutionnels et internationaux ont commencé à jouer un rôle plus important. Par exemple, à partir de 1992 aux États-Unis, des fonds gérés par de grandes banques d'affaires américaines, comme Goldman Sachs et Morgan Stanley, ont commencé à investir au Royaume-Uni puis en France. Leur stratégie d'investissement était orientée vers l'optimisation de la plus-value, une approche plus financière que celle des investisseurs institutionnels français traditionnels. Ces fonds ont importé une vision plus financière de l'actif immobilier, analysé avec des méthodes utilisées pour d'autres classes d'actifs (actions, obligations, etc.), et déconnecté d'une approche "affective" de la pierre .

La financiarisation a permis d'introduire des instruments financiers sophistiqués, tels que les REITs (Real Estate Investment Trusts), facilitant l'accès au marché pour un plus grand nombre d'investisseurs. Cette évolution a dynamisé le secteur, en attirant des capitaux étrangers et en diversifiant les options d'investissement. L'internationalisation a également ouvert de nouvelles opportunités, rendant le marché immobilier plus compétitif et intégré à l'économie mondiale.

L'immobilier a progressivement émergé en tant que classe d'actif à part entière, notamment après le krach de 2001, entraînant un afflux de capitaux d'investisseurs institutionnels cherchant à diversifier leurs actifs. Ces investisseurs ont réorienté leurs acquisitions vers l'immobilier d'entreprise, considéré comme plus rémunérateur que le logement La gamme des produits immobiliers "investissables" s'est élargie aux commerces, plateformes logistiques et locaux d'activités standardisés. La gestion d'actifs (Asset Management), venue des États-Unis avec des banques d'affaires comme Goldman Sachs dès 1995, s'est développée en France, axée sur une gestion économique de l'immobilier et la réalisation de plus-values à court terme.

En route vers l’immobilier et la propriété de demain

L'émergence de nouvelles formes de propriété face aux difficultés d'accession

ace aux difficultés d'accession à la propriété, de nouvelles formes de propriété ont émergé, offrant des alternatives viables pour les acheteurs potentiels. Les modèles innovants, tels que la propriété partagée et le co-living, permettent une répartition des coûts et une flexibilité accrue. Ces approches visent à rendre la propriété plus accessible et mieux adaptée aux modes de vie modernes. Ces formes de propriété continuent de gagner en popularité, offrant des solutions créatives aux défis du logement.

  • Accession Partielle et progressive: Les besoins en logement ont changé : la mobilité professionnelle et géographique est accrue, la durée de détention des biens diminue, et la valeur d’usage du logement prend autant d’importance que sa valeur patrimoniale. Pour répondre à ces évolutions, des dispositifs d’accession partielle ou progressive à la propriété se sont développés, limitant les droits réels conférés à l’acquéreur et réduisant le coût d’entrée.
  • Dissociation foncier-bâti et Bail Réel Solidaire (BRS): La dissociation entre la propriété du sol et celle du bâti permet de diminuer le coût d’acquisition d’un logement. Le Bail Réel Solidaire (BRS), inspiré par les Community Land Trusts, permet à un ménage d’acheter uniquement le bâti, tandis qu’un organisme de foncier solidaire conserve la propriété du terrain. Ce dispositif, réservé sous conditions de ressources, permet d’accéder à la propriété à un prix inférieur de 30 à 40 % au marché, tout en assurant la pérennité de l’accessibilité sociale du logement lors des reventes
  • Propriété partagée et multipropriété: La propriété partagée (multipropriété, copropriété d’usage, co-living) connaît un regain d’intérêt. Plusieurs personnes acquièrent ensemble un bien immobilier et en partagent les droits d’usage. Ce modèle, qui s’étend des résidences secondaires aux habitats participatifs, permet de mutualiser les coûts et de répondre à des aspirations sociales (vivre en communauté, réduire l’empreinte écologique).
  • Habitat participatif et habitat partagé :  permet à des groupes de personnes de concevoir, construire et gérer collectivement leur logement, souvent avec une forte dimension écologique et sociale. Ce mode d’habitat favorise la solidarité, la mutualisation des espaces et des services, et une gouvernance partagée. Il s’inscrit dans une recherche de “logement sociétal” adapté aux enjeux du XXIe siècle.
  • La flexipropriété : La flexipropriété est une innovation récente où l’acquéreur devient propriétaire pour une durée limitée (par exemple 50 ans) à un prix bien inférieur au marché, avec des clauses de sortie et de revente encadrées

Développement durable de l’immobilier

Le développement durable est devenu un impératif pour le secteur immobilier, avec une importance croissante des réglementations environnementales.

Les initiatives de durabilité visent à réduire l'empreinte carbone des bâtiments et à promouvoir des pratiques de construction écologiques. Les réglementations encouragent l'utilisation de matériaux durables et l'amélioration de l'efficacité énergétique.

Ces efforts reflètent une prise de conscience croissante de l'impact environnemental du secteur immobilier, et ils influencent fortement les décisions d'investissement et de développement.

Prise de conscience écologique et immobilier durable : La prise de conscience écologique pousse le secteur immobilier à construire des bâtiments écoénergétiques et à adopter des pratiques durables . D "Management de l'immobilier" on mentionne le "verdissement" des produits immobiliers comme un facteur rendant l'immobilier plus agile.

Au niveau mondial, l'immobilier est responsable d'un tiers de la consommation d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre . En France, il consomme 43 % de l'énergie, contribue à 27 % des émissions de GES, et est responsable de 17 % des prélèvements d'eau potable et de 40 millions de tonnes de déchets par an. Face à cet impact, le secteur réagit en mettant l'accent sur la maîtrise de l'énergie et les certifications environnementales . Ce mouvement a été accéléré par le Grenelle de l'environnement en 2007.

Le développement durable est devenu un enjeu majeur pour le secteur immobilier, se traduisant par des réglementations, des initiatives professionnelles et une prise de conscience croissante des acteurs face à l'impact environnemental des bâtiments.

L’immobilier de demain sera tokénisé

Les technologies numériques, regroupées sous le terme PropTech, transforment le secteur immobilier en introduisant de nouvelles façons de gérer et de transiger des biens immobiliers.

Les innovations technologiques incluent des plateformes en ligne pour l'achat, la vente et la location, ainsi que des solutions de gestion immobilière basées sur la blockchain. Ces technologies augmentent l'efficacité, la transparence et la commodité dans le secteur immobilier.

Solution émergente et formidable alternative au Crowdfunding immobilier, la tokénisation est une révolution dans l’approche de l’investissement immobilier, c’est la solution que propose justement KryptoStone. L’immobilier tokénisé désigne le processus par lequel un bien immobilier est fractionné en parts numériques appelées tokens, chacune représentant une fraction de la propriété du bien. Ces tokens sont créés et échangés sur une blockchain, ce qui permet de rendre la propriété immobilière plus accessible, liquide et transparente.

Par exemple, Une société détient un immeuble et émet 100 000 tokens, chaque token représentant 0,001 % du bien. Les investisseurs achètent ces tokens, perçoivent une part des loyers proportionnelle à leur détention, et peuvent revendre leurs tokens à tout moment sur une plateforme dédiée.

Conclusion

L'histoire de l'immobilier est une chronique de transformations sociales, économiques et juridiques. Des formes primitives de propriété aux systèmes modernes de tokénisation, chaque époque a apporté des changements significatifs.

Les évolutions clés incluent la codification du droit de propriété, la démocratisation de l'accès au logement, et l'intégration des technologies. Ces transformations ont façonné un marché immobilier dynamique et en constante adaptation.

En ce qui nous concerne, notre vision est celui d’un accès à la propriété totalement démocratisé et libéré des barrières traditionnelles. C’est aussi pour nous un moyen de participer à l’évolution de ce marché dont l’histoire est, vous l’aurez remarqué à la lecture de ce texte, plutôt complexe. La tokénisation est une nouvelle étape pour l’accession où l’investissement dans la propriété et probablement une réponse solide face aux enjeux liés au logements qui nous attendent encore dans le futur.

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